L’idée de réunir des
Etats Généraux (E.G) ressurgit de façon récurrente : E.G. de
l’environnement, E.G. de la santé, E.G. de la gauche… Vastes consultations sans
a priori, sauf à vouloir faire du neuf à partir des crises du présent. 1789 est
la référence intellectuelle et politique. Or les Etats Généraux de 1789 ne
furent que les derniers d’initiatives royales depuis 1302.
Les avant-derniers furent ceux de 1614, convoqués par Marie
de Médicis, l’incompétente régente du jeune roi Louis XIII, cela dans un
contexte de troubles. En 1613, des révoltes mobilières se multiplient.
L’Anjou subit maints pillages, ce qui entraînent
la venue à Angers en août 1614 de la régente et du jeune roi Louis XIII. Pour calmer les esprits, Marie de Médicis y convoque des Etats Généraux. Ils se tiendront à Paris, d’octobre 1614 à février 1615, sans résultat du fait d’oppositions majeures entre les trois ordres : Clergé, Noblesse, Tiers Etat.
la venue à Angers en août 1614 de la régente et du jeune roi Louis XIII. Pour calmer les esprits, Marie de Médicis y convoque des Etats Généraux. Ils se tiendront à Paris, d’octobre 1614 à février 1615, sans résultat du fait d’oppositions majeures entre les trois ordres : Clergé, Noblesse, Tiers Etat.
Le cahier de doléances du Tiers Etat angevin reflète bien
ces oppositions rédigées par 10 délégués, 2 de la haute bourgeoisie (le maire,
Du Mesnil et le futur maire d’Angers, Lanier) et 8 de la moyenne bourgeoisie (4
marchands et 2 avocats). Les paroisses rurales ne sont pas représentées.
Les doléances
Les doléances (combien ?) ont été déposées à la Mairie
d’Angers (à l’époque place Imbach) dans une « boite en forme de tronc ».
Elles portent sur certains privilèges de la noblesse, sur le
carcan de multiples réglementations ou législations, sur les abus du clergé.
Mais rien sur le sort de l’immense majorité, la paysannerie… Par ailleurs, la
monarchie n’est pas mise en cause et tels députés s’en remettent aux Roi, « père très béni (…), pour remédier aux
abus et désordres qui vont déformant le royaume ».
« Pour
la réformation de l’ordre ecclésiastique »
Simonie et Commende (1) sont dénoncées ainsi que l’évêque
d’Angers, Miron, consacré à 18 ans, sans avoir reçu les ordres ! Les
abbayes seraient « dégénérées pour
la plupart (…) en cloaques de tous les vices ». De plus, de nombreux
prélats ne résident pas sur place et cumulent les bénéfices (les revenus
ecclésiastiques).
« Ce désordre a
permis (que naissent) l’hérésie, les séditions (…) et la paix en laquelle nous
vivons (2) ne peut être longue durée sans
réformation. »
En l’occurrence il s’agit de placer le clergé sous contrôle
royal dans une optique gallicane (3). Celui-ci se nourrit localement de l’hostilité aux
jésuites : ces « soldats du
Christ », qui ne relèvent que du Pape. Ils font concurrence à
l’Université d’Angers avec leur Collège de la Flèche.
Et la Noblesse ?
Deux revendications essentielles à son encontre. La
démolition des forteresses féodales qui
« favorisent les remuements contre
l’Etat ». Et l’Anjou en a su quelque chose pendant près de trente ans
de guerres politico-religieuses.
La suppression des pensions aux nobles distribuées à
profusion pour acheter la paix, tant par Henri IV que par la régente Marie de
Médicis.
La grande
affaire : la fiscalité
Il faudrait entre autre abolir « la maudite » vénalité des offices (charges administratives) (4) qui
ferme « la porte (…) au savoir
et à la vertu » ; et qui est source de partialité, de frais de
justice exorbitants. Racine y fait toujours écho à la fin du siècle dans sa
comédie des plaideurs. L’Anjou est province Grande Gabelle : la taxe sur
le sel y est au maximum, alors que la Bretagne voisine en est affranchie. Il
faut supprimer la Gabelle. Enfin, ces gens du Tiers que l’activité économique
préoccupe, souhaitent la suppression des péages, la « grande oppression des marchands », et au moins, la réduction
des traites ces douanes entre provinces à l’intérieur du royaume.
De plus, l’unification des poids et mesures apparaît
nécessaire « pour faciliter le
trafic et le commerce », (en particulier pour le vin vers la
Bretagne).
Et, il faut bien sûr réduire la taille, cet impôt qui ne
pèse que sur la personne des roturiers. Bref, 1614 posa des questions que 1789
devaient résoudre.
J.P. Brachet
Commende : revenus d’un évêché ou d’une abbaye
attribués à un clerc ou à un laïc.
(2) Edit de Nantes 1598.
(3) Le Gallicanisme entendait
restreindre l’autorité du Pape sur l’église de France au profit de l’autorité
royale.
(4) Y compris l’office de
geôlier qui percevait des droits d’entrée et de sortie !
Source : Cahier des gens du Tiers
Etat du pays et duché d’Anjou en 1614, étude d’Albert Meynier in Revue L’Anjou 1905.
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