Réveil lundi 8 mai, fête de la victoire de mauvais augure.
Hier, soir c’est la tronche de la fille du borgne qui est apparue sur le petit
écran.
A mon âge, si mon courage est toujours là, mes facultés pour
des batailles rangées ont sérieusement diminuées, mais il faut y aller, entrer
en dissidence, avant de prendre les armes.
Dans mon administration, si j’étais encore en activité,
j’aurais dû ferrailler contre les nouveaux collabos, qui du jour au lendemain
se seraient découverts, contre les décisions allant à l’encontre du service
public, contre mon exclusion et celles de mes camarades militants syndicaux. Il
aurait été nécessaire d’entrer en clandestinité pour tremper ma plume dans le
vinaigre pour condamner les nouveaux hérauts fascisants. Il m’aurait été utile
de relire l’histoire de la résistance…
Obligé de changer toutes les adresses du gouvernement et
puisque Vichy, c’est d’un autre temps, choisir Bézier sera opportun.
Sur le petit écran, chaque chaine se livre une concurrence acharnée pour
diffuser le jour du « saigneur ». Les cinés et théâtres de quartier
voient leur existence mis en péril par les coupes sombres dans les budgets et
par le ministère de la censure, qui a supplanté celui de la culture.
Les nouvelles agences privées (travail/patrie) appliquent le
plan de retour à la maison des femmes, mesures prises pour lutter contre le
chômage des hommes. Elles sont incitées à ne s’occuper que des enfants !
Les prud’hommes dissouts, les purges au sein de tous les
barreaux de France et de Navarre entraînent un accroissement des mesures de
justice expéditive. Les prisons débordent. Certains proposent de concevoir et
tester des miradors équipés des nouvelles technologies.
Des porteurs de képi, si heureux de leur vote majoritaire,
sont revenus. Après mon pote Abdel, ce coup-ci ils sont venus chercher Léopold
mon voisin sénégalais. Nous n’avons plus de nouvelles ; mais je ne vais
pas tarder de les rejoindre, moi le protestataire, le progressiste, le rouge.
En attendant, la faculté de derrière chez moi est investie
par les étudiants, déjà en guerre contre les milices du GUD ressuscitées et de
l’UNI subventionné par le commissaire de la Nation, qui a pris la place du
préfet. Les forces de l’ordre, dont les effectifs ont été multipliés par deux
attendent de charger l’arme au pied.
Dring, dring, on vient me chercher…Non c’est le réveil
qui me tire de cet affreux cauchemar. La lutte continue donc !
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