samedi 10 décembre 2016

Laïcité et vérité



Une phrase de l’Anjou laïque n°117 a retenu mon attention ; elle dit que la République assure la liberté de croire « dès lors que sa pratique est conduite au sein de l’espace privé ».     C’est une idée répandue mais fausse dont il faut se séparer pour être sérieux.     D’abord, « La République ne reconnait aucun culte », cela veut dire qu’elle ne reconnait aucun culte particulier, contrairement à l’Ancien régime qui ne reconnaissait que l’Eglise catholique, la religion unique du prince devant aussi être celle du peuple. C’était aussi un peu ça sous le Concordat abrogé en 1905.
Mais la République reconnait toutes les religions à travers les activités du Bureau central des cultes du ministère de l’intérieur qui gère les lois et décrets ainsi que les aumôneries du 2ème alinéa de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905. Le ministre lui-même ou le Premier ministre reçoivent assez régulièrement
pour dialoguer et noter leurs doléances, les ministres des divers cultes majeurs exerçant en France, comme ils reçoivent d’autres associations nationales ou les syndicats. Ils participent parfois à des dîners ou des offices.
La loi stipule que l’Etat, les départements et les communes assurent de leurs deniers publics l’entretien et la conservation des édifices des cultes dont ils sont propriétaires : articles 12, 13 et 19, mais qu’ils laissent néanmoins gratuitement à la disposition des associations cultuelles affectataires en vertu de l’article 13 premier alinéa.
Or justement, le culte doit s’exercer publiquement, dans les édifices consacrés : églises, temples, synagogues, mosquées, pagogues, sans quoi c’est une secte. L’exercice public du culte est expressément exigé en ces termes par les articles 13, 18 et 19 et il est placé « sous la surveillance des autorités dans l’intérêt de l’ordre public » article 25, police des cultes. En outre, les processions sont admises selon les mêmes règles que toute autre manifestation sur la voie publique : chaque printemps des traditionalistes battent librement le pavé d’Angers du quai Ligny à la place du Tertre pour célébrer le Grand sacre. On ne peut interdire le voile islamique simple hors établissements scolaires, ni les tenues monastiques, ni le burqini sur les plages, sauf menace manifeste à l’ordre public local ou règlement intérieur dans les entreprises et les administrations. Les ministres des cultes ont accès sans réserve à tous les médias nationaux et ne s’en privent pas ! La Croix est un quotidien national en partie subventionné par l’Etat. France 2 ouvre généreusement son canal aux religions les dimanches matins de 9h à 11h30. Six jours de fêtes chrétiennes sont décrétés fériés et chômés par les articles L 222-1 et L 222-1-1 du code du travail.
On n’oubliera pas les subventions publiques  aux établissements  d’enseignement privé confessionnels de tout niveau et le régime dérogatoire d’Alsace Moselle où les ministres des cultes catholique, protestant et israélite sont rémunérés par l’Etat, survivance locale anachronique du concordat de 1801, sous la première République bonapartiste.
Ainsi on peut être « sans religion » selon la terminologie internationale tout en devant admettre calmement ce qui précède, qui est la vérité dans la France laïque d’aujourd’hui, sauf à militer dans la paix et la bonne foi pour que les extrémistes de tous bords cessent leurs nuisances dangereuses.
 
Max  Bayard

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