J'ai lu avec beaucoup d'intérêt, dans le dernier numéro d'Anjou laïque, l'article éclairant
d'Henri Pena-Ruiz consacré à l'affaire Baby-Loup et d'abord paru dans Libération. Je suis cependant en
désaccord partiel avec ce passage : « Dans nombre d'écoles privées religieuses financées sur fonds publics,
le “caractère propre est affiché ostensiblement sous forme de symboles
religieux, et assumé sans scrupule dans l'enseignement lui-même ». Mes
réserves portent sur l'interprétation du droit et sur la présentation des
faits.
Tout d'abord, les établissements en question ne sont pas
seulement financés sur fonds publics mais associées au
service public et l'enseignement y est assuré par des agents de l'État. L'imprécision est d'autant plus étonnante qu'elle affaiblit la thèse de l'auteur. Le même jour que l'arrêt concernant Baby-Loup (19/03/2013), la Cour de cassation en effet a justifié le licenciement, par la CPAM 93, d'une employée qui refusait d'enlever son voile : la réserve s'impose aux salariés qui exercent un service public alors même qu'ils sont de droit privé ; a fortiori donc, pourrait-on penser, lorsqu'ils relèvent du droit public.
service public et l'enseignement y est assuré par des agents de l'État. L'imprécision est d'autant plus étonnante qu'elle affaiblit la thèse de l'auteur. Le même jour que l'arrêt concernant Baby-Loup (19/03/2013), la Cour de cassation en effet a justifié le licenciement, par la CPAM 93, d'une employée qui refusait d'enlever son voile : la réserve s'impose aux salariés qui exercent un service public alors même qu'ils sont de droit privé ; a fortiori donc, pourrait-on penser, lorsqu'ils relèvent du droit public.
Je m'étonne à ce sujet de l'indifférence avec laquelle
l'opinion et les milieux laïques ont accueilli le nouveau statut de
l'enseignement catholique publié par l'épiscopat le 1er juin 2013.
On y lit en effet que le rôle public des établissements catholiques « associés au service public d'éducation » ne naît pas d'une
initiative privée mais de leur « nature
même » il ne leur est donc pas conféré non plus par une délégation de
l'État), et que « les diverses
disciplines ne présentent pas seulement des connaissances à acquérir mais des
valeurs à assimiler et des vérités à découvrir » (art, 12, 14, 21).
Mais la réalité est bien loin de ce dernier principe.
Contrairement à ce qu'écrit Henri Pena-Ruiz, l'orientation confessionnelle de
l'enseignement est exceptionnelle. En 2003, le rapport Stasi, dont il était
l'un des signataires, l'attribuait d'ailleurs à une « minorité
activiste » (3.2.1.1) ; ajoutons que celle-ci ne se trouve pas
forcément dans des établissements catholiques,
Le crucifix en revanche est en général présent. Le 11 mai
2010, à l'Assemblée nationale, le ministre Laurent Wauqiez, interrogé sur ce
sujet, a fait valoir que les établissements ne sont pas soumis à la loi du 15
mars 2004 sur l'interdiction des signes religieux. La réponse est doublement
contestable. D'abord, cette exemption concerne les élèves. Ensuite, elle a été
admise par les élus UMP et PS au motif que ces écoles ne font pas partie du
service public ; or un an plus tard les mêmes ont voté la loi Censi, qui
confirme et renforce le statut public des enseignants. Le ministre il est vrai
a aussi plaidé l'acceptation des parents.
Ces élus ont une conception sélective de la laïcité
républicaine. La hiérarchie catholique a avec celle-ci un désaccord
fondamental. Henri Pena-Ruiz est à mes yeux un de ceux qui la défendent le
mieux, et mes observations se veulent surtout des précisions ou des
compléments
Marc Andrault
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