lundi 24 octobre 2016

Enseignement professionnel public sous statut scolaire : Service public en danger

Cécile Chène syndicat de l’enseignement professionnel FSU

Malgré l'annonce gouvernementale de la priorité donnée à la jeunesse et le fait que 700 000 jeunes soient scolarisé-es dans cette voie (¼ en CAP et ¾ en Bac Pro) soit 1/3 de la jeunesse lycéenne,
les élèves et personnels de l'enseignement professionnel public n'ont pas bénéficié depuis le début de ce quinquennat de mesures ambitieuses pour permettre d'améliorer leurs conditions d'études et de travail.

Pour exemple, la formation des PLP n'a fait l'objet d'aucune réflexion ministérielle, le bac pro 3 ans toujours décrié par la profession n'a pas suscité de bilans objectifs et approfondis, les classes surchargées dans certaines filières n'ont pas été allégées. Les lycées professionnels sont toujours exclus de la pondération accordée aux LGT, aucune réflexion n’a été menée pour intégrer ces lycées dans les nouveaux dispositifs de l’Éducation prioritaire.

Prétendant lutter contre le chômage des jeunes, le gouvernement poursuit un cap qui
a pourtant prouvé son inefficacité : il tente toujours de développer l'apprentissage notamment dans les lycées professionnels préférant ainsi répondre aux injonctions du patronat plutôt que d’investir massivement dans l’enseignement professionnel public.. Ce choix injustifié favorise la mixage des publics, dans la classe, en niant les besoins spécifiques des différents apprenant-es et en détériorant les conditions de travail des enseignant-es.

La casse des diplômes professionnels est très alarmante elle aussi. Plusieurs dispositifs sont à l'œuvre pour y parvenir : l'introduction de blocs de compétences qui risque de créer des niveaux infra V non reconnus par les conventions collectives des branches professionnelles et qui vont contre l’élévation du niveau de qualification des jeunes, des fusions et des rénovations de baccalauréats qui vident les diplômes de leurs contenus d'enseignement et qui entravent directement l'insertion professionnelle et la poursuite des jeunes dans l’enseignement supérieur.

Les régions quant à elles asphyxient les établissements par une taxe professionnelle en baisse de 30 % depuis 2 ans. Cette baisse financière impacte directement le fonctionnement des LP : les enseignant-es de disciplines professionnelles n'ont pas les matériaux nécessaires pour l'ensemble de leurs classes. Et la loi Travail va encore accentuer ce grave problème car elle autorise dorénavant aux établissements scolaires du second degré hors contrat de bénéficier d'une partie de cette taxe !

Le SNUEP-FSU est par conséquent très insatisfait de ce bilan et demande toujours de mesures ambitieuses dotées de moyens supplémentaires pour les élèves et les personnels de l'enseignement professionnel public sous statut scolaire.
La voie professionnelle publique est un enjeu primordial car elle forme les ouvrièr-es et salarié-es qui constitueront le salariat d'exécution de demain (57 % des emplois). Elle ne doit donc pas être laissée aux seuls mains du patronat.

L'objectif d'atteindre 80 % d'une classe d'âge au bac a été atteint grâce aux bachelier-es pro.
  • Taux de réussite 82 %
En augmentation constante de 1987 jusqu'en 2012. Cependant, l’une des conséquences directes du bac pro 3 ans est la perte de 10 points (77 %) en 2013. Depuis on constate une amélioration constante mais le taux reste inférieur à celui atteint en 2010.

Bref rappel concernant le Bac Pro 3 ans qui s'est mis en place contre l'avis de quasiment tous les acteurs :
2001 : demande de l'IUMM d'une main d'œuvre plus rapidement disponible mais pas de demande de généraliser à toutes les filières.
2005 : rapport négatif de l'inspection générale.
2007 : annonce du ministre Darcos de le généraliser malgré un avis négatif du sénat. Principal objectif : les enseignant-es de LP seront la principale cible des coupes budgétaires. Conséquence : suppression de 5000 équivalents temps plein de PLP. Jamais les élèves, leur réussite, leur insertion professionnelle n'ont été au centre des débats pour imposer cette réforme.

Ce taux de réussite n'atteindra pas le taux du baccalauréat général et technologique sans des politiques publiques volontaristes de la part de l'ensemble des acteurs car :
- élèves majoritairement issu-es de familles modestes qui concentrent des difficultés sociales, économiques et scolaires importantes et qui vivent dans des quartiers ou dans des zones rurales où les politiques culturelles sont déficientes et/ou pauvres.
- Elèves fragiles : le choix de leur octroyer 1 an de plus pour obtenir un bac était parfaitement légitime.
  • Élèves orientés et affectés encore par défaut (28 % en seconde et 42 % en CAP) : nécessité de revoir les pratiques d'orientation dans leur ensemble.

Pour le SNUEP-FSU, il faut :
  • Améliorer et d'augmenter l'offre de formation sur l'ensemble du territoire.
  • Améliorer la qualité de la formation des élèves : ça passe obligatoirement par un regard précis sur leur condition d'études (très corrélé évidemment avec les conditions de travail des PLP)
  • Redonner du temps d'enseignement notamment en diminuant le temps en entreprise.
  • Dédoubler l'ensemble des classes de seconde (rappel des classes de 35 en tertiaire) et interdire les pratiques de regroupement des classes de CAP en matière générale.

L'élévation du niveau de qualification est un enjeu primordial. L'Etat s'est d'ailleurs assigné un objectif ambitieux : 60 % d'une classe d'âge doit être diplômé de l'enseignement supérieur. Cet objectif ne pourra être atteint qu'en portant un regard précis sur les bachelier-es professionnel-les.

Quelques chiffres
  • 80 % des bachelièr-es professionnel-les demandent une poursuite d'étude en 2016 (160 000).
  • 35 % ont obtenu une place dans un établissement du supérieur en 2015.
  • Spontanément les bachelier-es professionnel-les demandent une section STS : 27,1 % l'ont obtenu en 2015 soit 35 000 élèves. Il y a donc nécessité d'augmenter les capacités d'accueil en BTS : le ministère propose d'ouvrir 2000 places par an sur 5 ans dans ces filières ce qui aboutira à 10 000 places supplémentaires en 2020 : on est toujours loin du compte !
  • Taux de réussite en BTS des bachelièr-es professionnel-les : 59 % quand il est de 85 % pour les bacs généraux .
Pour le SNUEP-FSU : il est indispensable de regarder de plus près les contenus d'enseignements en amont et les rendre plus ambitieux en se donnant les moyens de conserver le niveau de réussite.
Cela passe aussi par plus de moyens humains pour dédoubler les classes surchargées et un enseignement de philosophie en terminale.
On ne peut pas parler de parcours réussi et d'excellence si on laisse sur le côté les chiffres alarmants des décrocheur-es, ce ne serait pas honnête !
  • 110 000 jeunes décrochent tous les ans.
  • 50 % de ces jeunes sont en LP.
  • 10 % des élèves de seconde et première décrochent et 20 % en première CAP (contre près de 30 % en apprentissage : 36 % de contrats rompus pour les moins de 18 ans, 16 % dans le sup).
  • 50 % sont au chômage 3 ans après leur sortie du système de formation.
230 000 euros : le cout d'une vie professionnelle d'un-e décrocheur-e.

Le gouvernement s'est engagé à divisé par deux ces chiffres. Or, sur les 4000 postes fléchés dans la loi d'orientation pour la "grande difficulté scolaire", rien n'a été dédié dans les lycées professionnels.
La prévention du décrochage coute moins cher et, dans ce cadre, le lycée pro a toute sa place
dans le processus.
Si le droit de retour en formation dans les lycées professionnels est prévu dans la loi, aucun moyen supplémentaire n’est prévu pour l’accueil et l’accompagnement de ces jeunes. La qualification des jeunes décrocheurs doit devenir une priorité et doit être mise en œuvre par le service public de la formation professionnelle initiale avec des moyens spécifiques dédiés.
500 NOUVELLES FORMATIONS : un effort budgétaire qui s’est fait attendre
L'annonce de l'ouverture de 500 nouvelles formations pour la rentrée 2017 est un point positif qui arrive cependant bien tardivement dans ce quinquennat. Le SNUEP-FSU veillera à ce que les 1000 postes budgétisés pour la rentrée 2017 soient affectés à des formations sous statut scolaire, du CAP au BTS en lycée professionnel public.
L’ouverture de ces 500 formations se traduira certainement par un accroissement d’effectifs. Les prévisions de la DEPP1 pour la rentrée 2017 annoncent une augmentation d'environ 5 000 élèves en 2nde professionnelle et estiment à plus de 900 la baisse en 1ère année de CAP.
La moyenne par classe, toutes filières confondues, est de 20 élèves en LP. Le ministère s'est engagé à étudier ce chiffre de plus près car il n'est pas rare que, dans les filières tertiaires, les effectifs se rapprochent des 30 élèves par classe et qu'en CAP des classes de filières différentes soient regroupées pour récupérer des moyens d'enseignement.

Pour le SNUEP-FSU, ces effectifs importants sont inacceptables. Les élèves de lycée professionnel cumulent souvent des difficultés sociales et scolaires qui nécessitent de l'attention pédagogique pour éviter les décrochages et des moyens pour permettre à tous les jeunes de réussir leur parcours. Le ministère doit donc consacrer des efforts budgétaires pour ces élèves.
Le SNUEP-FSU restera vigilant quant à la réalité des ouvertures de ses 500 formations et dénoncera toute dégradation des conditions d'études des élèves et de travail des personnels.

Quelques données
  • L'apprentissage prépare aux mêmes diplômes que la voie professionnelle dans des proportions moindre. Niveau CAP et Bac Pro : 700 000 élèves en LP contre 300 000 par apprentissage.
  • CAP : 50 % dans les 2 systèmes
  • Bac Pro essentiellement en LP
  • L'apprentissage se développe surtout au niveau du supérieur car les entreprises exigent des apprenti-es déjà qualifié-es, donc baisse régulière en CAP et bac pro. (cf. précisions ci-dessous).

  • Différences essentielles : le statut et le temps d'enseignement.
Les apprenti-es sont des salarié-es donc soumis au code du travail. Ils/elles ont (environ) 1/3 de leur temps en centre d'apprentissage et 2/3 en entreprise.

  • Coût
Investissement public : 18 700 euros par an pour les apprentis, 12 210 euros pour les scolaires. La dépense en faveur de l’apprentissage s’élève à 8 milliards d'euros contre 4 milliards pour les LP.

  • Taxe d'apprentissage : -30% depuis la réforme de 2014 pour les LP qui dysfonctionnent massivement depuis ce coup dur. Et cela s'aggravera avec la possibilité pour les établissements hors contrat du second degré qui pourront en bénéficier en conséquence de la loi Travail.

  • Taux d’accès au diplôme très inférieur à celui des scolaires (RAP 2014 et 2015)
7 jeunes sur 10 entrants en formation de CAP ou Bac Pro par la voie scolaire obtiennent leur diplôme. Celles et ceux empruntant la voie de l’apprentissage ne sont qu’un-e sur deux en bac pro et 6 sur 10 en CAP.

  • Réussite à l'examen inférieure à celle des scolaires (note DEPP, février 2016).
La différence en faveur de ces derniers est nette pour le CAP et surtout pour le BTS (respectivement +2,1 et +6,9 points en 2014) et si l'écart est souvent en faveur de l'apprentissage pour le bac pro, il est minime (+0,7 point en moyenne).

Le LP est plus efficace et coute moins cher aux contribuables

Parlons de l'investissement des entreprises
L'apprentissage est essentiellement concentré sur les entreprises de moins de 50
salarié-es voire de 10 salarié-es.
Les entreprises de plus de 250 ont des quotas à respecter : elles doivent embaucher 5 % d'apprenti-es.
Constat : soit elles recrutent des apprenti-es déjà qualifié-es, soit elles préfèrent payer la CSA (amendes).

DES ATOUTS EN TROMPE-L'OEIL
L'alternance proposée par l'apprentissage n'est pas un gage de formation de qualité. L'entreprise meilleure formatrice que l'Education nationale, parce que plus concrète, est un leurre. Les enquêtes démontrent que la qualité de la formation est très peu vérifiée, dans les CFA comme dans les entreprises. Faute de temps (chez les artisans, dans les PME fortement concurrencées) et faute de tuteurs/trices formé-es, l'apprenti-e est trop souvent considéré-e comme de la main d'oeuvre à bas coût et non comme un-e jeune à former. De leur côté, les scolaires bénéficient souvent d'un matériel de qualité dans les LP, ont des enseignant-es formé-es à la pédagogie, connaissent aussi l'entreprise : celles et ceux de bac pro par exemple font 22 semaines de stages (les PFMP) en 3 ans. Ils ont même l'avantage de pouvoir changer de site, donc d'environnement de travail, ce qui peut être plus formateur à long terme pour s'adapter et évoluer.

Le taux d'insertion dépend d'abord du diplôme, comme l'a rappelé en mai 2016 la DEPP
7 mois après l'obtention du diplôme par apprentissage en 2014 : 54,8 % des titulaires d'un CAP ont un emploi contre 77,4 % des titulaires d'un BTS.
Pour celles et ceux qui n'ont pas obtenu leur diplôme, les taux sont respectivement de 31,7 % pour les CAP et de 64,4 % pour les BTS.
Le Cereq confirme cette tendance (Bref n° 346) : 3 ans après l'obtention du diplôme, le taux atteint 74 % pour les ancien-nes apprenti-es en CAP-BEP-Mention complémentaire mais de 90 % pour les ancien-nes apprenti-es en BTS.
Le Cereq rappelle aussi que « les formations par apprentissage ne permettent pas pour autant d'échapper aux effets d'une conjoncture dégradée » (baisse de 12,6 points du taux d'insertion à 7 mois entre 2008 et 2015 d'après la DEPP) et que l'apprentissage « tend à se développer dans les niveaux de formation les moins exposés au risque de chômage, ainsi que dans des filières offrant déjà des débouchés plutôt favorables ». A l'inverse, les LP offrent des formations dans tous les secteurs, notamment dans le tertiaire peu ouvert à l'apprentissage, et dépendent nettement moins de la conjoncture économique immédiate.

Les entreprises préfèrent proposer des contrats d'apprentissage pour des diplômes du supérieur et se désengage des CAP et BP (DARES Analyses, 2015-057).
Entre 2009 et 2014, la part des entrées en apprentissage pour préparer un CAP ou un BEP est passée de 48 à 41 %, tandis que les entrées pour préparer un diplôme de niveau Bac + 2 ou plus sont passées de 24 à 34 %. Et 46 % des nouveaux apprenti-es ont au moins le bac.
Les grandes entreprises en particulier privilégient les publics déjà certifiés, disqualifient les CAP et leurs titulaires (Prisca Kergoat, revue Diversité n° 180, 2015). L'accumulation des aides financières publiques aux entreprises est donc inefficace : l'apprentissage est de moins en moins une voie de formation pour les jeunes qui sortent du collège, pour les moins diplômés, pour les plus éloignés des « réseaux », pour les secteurs en tension, et ce parce que les « politiques éducatives participent à un détournement » de ce dispositif de formation (P.Kergoat, id.).
Les apprenti-es « du haut » ne sont pas les apprenti-es « du bas » (Cereq, Net.Doc n° 75, 2010).
Si les CFA, et désormais les régions, multiplient les campagnes vantant les « parcours gagnants » du CAP au master ou à un diplôme d'ingénieur, la réalité est tout autre. La loi Seguin de 1987 a ouvert l'apprentissage à tous les niveaux, mais les chances de poursuites d'études sont infimes. Seuls 12 % des apprenti-es du supérieur sont issu-es de l'apprentissage. Son développement dans le supérieur renforce inégalités et discriminations et relève d'une stratégie qui devient « l'apanage des classes intermédiaires, contribuant à détourner sa vocation première, celle de permettre à des jeunes d'acquérir un titre de l'enseignement supérieur qu'ils n'auraient sans doute jamais pu acquérir autrement. »

DES FAILLES CACHÉES
Réussite à l'examen inférieure à celle des scolaires (note DEPP, février 2016).
La différence en faveur de ces derniers est nette pour le CAP et surtout pour le BTS (respectivement +2,1 et +6,9 points en 2014) et si l'écart est souvent en faveur de l'apprentissage pour le bac pro, il est minime (+0,7 point en moyenne).

Taux d’accès au diplôme très inférieur à celui des scolaires (RAP 2014 et 2015)
7 jeunes sur 10 entrants en formation de CAP ou Bac Pro par la voie scolaire obtiennent leur diplôme. Celles et ceux empruntant la voie de l’apprentissage ne sont qu’un-e sur deux en Bac pro et 6 sur 10 en CAP.

Sélection et discrimination à l'entrée en apprentissage
Toute analyse objective des taux de réussite à l'examen et d'insertion professionnelle doit aussi tenir compte des modes et du niveau de sélection avant la signature d'un contrat, en particulier pour les sortant-es de 3ème qui, laissé-es de côté, risquent de rejoindre l'armée des décrocheuses et des décrocheurs.
Pour Gilles Moreau, « les franges les plus paupérisées de la population, dont les deux parents sont au chômage ou pas qualifiées par exemple, accèdent difficilement à l'apprentissage » (revue Diversité n° 180, 2015). Par ailleurs, les travaux de Prisca Kergoat ont montré l'importance de la ségrégation sexuée : depuis 20 ans, les filles ne représentent qu'un tiers des apprentis. La même discrimination est flagrante aux dépens des jeunes issus de l'immigration. En 2006 déjà, G. Moreau mettait en garde : « si on tire trop l’apprentissage vers le haut, si la question des jeunes d’origine immigrée ne progresse pas dans l’apprentissage, si la question des filles ne progresse pas dans l'apprentissage, qu’est-ce qu’on fait ? On transfère sur le L.P., le lycée professionnel, les populations les plus en difficultés, notamment du point de vue de l'insertion sur le marché du travail ». (Actes du colloque "Points de vue sur l'apprentissage", nov.2007).
Des taux de ruptures de contrats et d'abandon élevés
En moyenne, 28 % des contrats sont rompus d'après la Dares (se soldant à 76 % par un abandon de l'apprentissage), mais les taux sont nettement plus élevés chez les plus jeunes (36 % pour les moins de 18 ans) et dans les formations préparant aux métiers de faible qualification (près de 50 % dans l'hôtellerie-restauration). À nouveau se pose la question des adolescent-es les plus fragiles qui, rejeté-es, se sentent encore plus dévalorisé-es et connaissent une entrée précoce dans la précarité.

Un signe d'impuissance : le mixage des publics et des parcours.
Mettre ensemble apprenti-es et scolaires, à travers les CFA publics et les lycées des métiers, est de plus en plus souhaité pour prétendre sécuriser les parcours, autrement dit pour compenser la précarité du statut. Mais cela veut dire transformer la voie scolaire en roue de secours du système de formation le plus injuste et inégalitaire qui soit. Cela va à l'encontre d'une revalorisation de la voie professionnelle.

À la recherche d'une pédagogie de l'alternance.
Cette volonté de mixages des publics et de parcours confirme le fait que la qualité de la formation est loin d'être prioritaire. Le rapport des Inspections générales de juin 2015 sur la sécurisation des parcours confirme d'ailleurs que « la mise en oeuvre de la pédagogie de l'alternance reste peu aboutie », parce qu'elle « repose sur des relations étroites entre CFA et entreprises », ce qui n'est envisageable qu'à petite échelle, avec peu d'intervenant-es. Mais un système auquel on demande de s'adapter à des départs en entreprise incessants, à des élèves qui ne suivent pas tous les mêmes cours, est voué à l'échec. Un échec voulu : il permettra de renforcer des formations basées sur des approches par compétences voire micro-compétences isolées au détriment d'une formation qui dispense des savoirs généraux et professionnels de qualité.

Le coût d'un apprenti
Une des plus grandes incohérences dans l'obsession actuelle du « besoin » de développer l'apprentissage est le coût, croissant, que cela entraîne. « L'effort de la nation en faveur de l'apprentissage a augmenté de 56 % de 2004 à 2010 » (B. Martinot, Institut Montaigne, mai 2015), pour une progression du nombre d'apprenti-es de seulement 16 %. En 2012, 18 700 euros ont été dépensés en moyenne par apprenti-e, contre 11 960 euros en moyenne pour un élève de la voie professionnelle (MEN, L'État de l'École, octobre 2013).


Pour toutes ces raisons, le SNUEP-FSU dénonce la persistance et le renforcement des mesures en faveur de l'apprentissage qui, non seulement, nuisent à l'enseignement professionnel public mais favorisent inégalités, discriminations et mise à l'écart des plus fragiles, scolairement et sociologiquement.

La baisse de la taxe d'apprentissage dans les lycées professionnels, le mixage des publics et des parcours, les campus des métiers et des qualifications ne peuvent que réduire l'efficacité de l'enseignement professionnel sous statut scolaire alors qu'elle devrait être privilégiée si l'on voulait vraiment réduire le taux de jeunes sans formation, augmenter le niveau de qualification et préparer aux métiers de demain au lieu de se focaliser sur un adéquationisme illusoire et court-termiste.
Le SNUEP-FSU a rappelé son extrême vigilance sur le fait que l'introduction de blocs de compétences ne doit en rien dénaturer les diplômes et en aucun cas alourdir la charge de travail des personnels. Il a rappelé l'importance des diplômes de l’éducation nationale qui n'ont ni la même finalité ni la même philosophie que les titres professionnels ou les CQP (certificats de qualification professionnelle) et, en ce sens, ils nécessitent une formation globale, générale et professionnelle axées sur les savoirs généraux et professionnels.

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