lundi 23 décembre 2013

Au revoir, M. Pavageau



par ses élèves de Bourgneuf-en-Mauges

De 1950 à 1975, Claude Pavageau a été instituteur à Bourgneuf-en-Mauges où la « carte scolaire » était un peu particulière. Toutes les familles envoyaient leurs filles à l'école catholique privée et leurs garçons à l'école publique ; c'était comme ça et bien peu y trouvait à redire. Le fils de la directrice de l'école privée suivit les classes de M. Pavageau comme tous les autres. Aujourd'hui, les plus anciens élèves de ces années ont plus de 70 ans, les plus jeunes moins de 50. Pendant un quart de siècle, des oncles et des neveux, six frères d'une même famille se sont assis sur les bancs de l'école jouxtant la mairie.
Chaque génération, chaque classe même, a bien sûr ses propres souvenirs de l'école primaire, pour les plus anciens: la préparation au certificat d'études ; pour les plus jeunes : le passage de la journée de
congé du jeudi au mercredi ... Mais pour tous, demeurent de M. Pavageau des images marquantes, hormis celles reçues - ou pas – le samedi midi après une semaine de travail méritoire. Pour un gamin de 9 ans qui faisait sa rentrée dans sa classe, ce qui frappait d'abord c'était une impression de puissance : une carrure, une voix, un regard, tout imposait le respect. Qui parmi les élèves n'a pas entendu de la part de ses parents : « Tu verras quand tu seras chez M. Pavageau ! » ou bien: «Je vais le dire à M. Pavageau ! » Phrases qui suscitaient toujours quelque inquiétude chez ceux qui faisaient les 400 coups mais qui marquaient surtout la reconnaissance de la référence morale de l'instituteur, sévère et juste, que tout le monde appréciait. Dans la classe, il fallait faire la preuve de l'état d'usure avancé d'une plume Sergent Major avant d'en obtenir une nouvelle, économie oblige. Outre les apprentissages en français et mathématiques, il y avait les séances de dessin, de sciences naturelles, de géographie: la carte de France administrative complète, levée à la main et qui inévitablement réduisait de moitié la superficie des derniers départements tracés... Dans la cour, peu de jeux de ballon : trop risqués pour les grands carreaux des hautes fenêtres. Sous le sable, des petits carrés de formica blanc fichés en terre avec des pointes de 90 afin de bien marquer les emplacements pour des figures de lendit parfaitement alignées. Dans la vitrine-bibliothèque, un fanion gagné au niveau cantonal rappelait aux générations postérieures l'exploit de leurs prédécesseurs. Sous le préau, suspendue à la plus grosse poutre, la corde lisse et, à côté, sur un portant métallique - fabrication maison - un vieux moteur de Simca qui servait à l'apprentissage des rudiments de mécanique.
Au-delà de la nostalgie bien souvent associée au temps de l'école et de l'enfance, les anciens élèves de M. Pavageau se rappellent avec émotion avoir connu, respecté et apprécié « Quelqu'un » qui était convaincu de son rôle de formateur et qui leur a enseigné avec enthousiasme ce qui ne s'oublie pas. Ensuite, il s'est toujours intéressé à ce qu'ils devenaient, heureux d'apprendre qu'untel « marchait bien », que tel autre « s'était bien débrouillé ». Toujours content de les revoir chez lui à Angers, ou à Bourgneuf, par exemple lors d'un mariage où il reconstitua, impromptu, une chorale d'anciens élèves de tous âges et leur fit chanter encore une fois La Volga...
En adressant à M. Pavageau un dernier salut plein d'affection, nous n'oublions pas que nous avons aussi été, et auparavant, des élèves de Mme Pavageau et nous l'assurons de toute notre sympathie en ce pénible moment.

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