dimanche 12 février 2012

Des présidents au pilori

Depuis l'instauration de la République en 1848, la démocratie et la morale publiques n'ont pas toujours trouvé leur compte dans l'élection d'un Président.

Les criminels
Louis-Napoléon Bonaparte, le tout premier. Elu en 1848, avec le soutien du « Parti de l'Ordre » (social) contre les « Rouges, les partageux », il s'empare du pouvoir à titre personnel par le coup d'état du 2 décembre 1851. Il a alors le soutien de l'armée, de l'église et de la bourgeoisie d’affaires. L’année suivant il se proclame empereur sous le nom de Napoléon III.
Adolphe Thiers (1871-1873), provisoirement chef de l'état et chef de l'exécutif après la chute de l'Empire et après voir conduit l'écrasement sanglant de la Commune de Paris. Antérieurement royaliste, il s'était convaincu que la République était l'institution correspondant le mieux aux mutations économiques et il la concevait comme une société anonyme (l'exécutif) avec un conseil d'administration (le législatif). Il est alors contraint à la démission par une majorité parlementaire nostalgique de la monarchie dans une France rurale qui restait à républicaniser.

Les piteux

Maurice de Mac-Mahon (1873-1879) piteux chef militaire lors de la guerre franco-prussienne de 1870, il est porté à la tête de l'état par une majorité parlementaire royaliste qui veut imposer à la France «  l'ordre moral ».
Les républicains s'imposent progressivement et, en 1875, des lois constitutionnelles établissent définitivement la IIIème République (à une voix de majorité!). Mais Mac-Mahon n'admet pas cette mutation politique et les républicains ayant conquis la majorité parlementaire, il doit démissionner.

Jules Grévy (1879-1887). Réélu en 1885, « modèle républicain » bourré de vertus bourgeoises, il aurait été le seul président de la IIIème République à s'être enrichi pendant son mandat. Il est contraint à la démission en 1887, accusé d'avoir laissé son gendre organiser depuis l'Elysée toutes sortes de trafics dont celui de décorations.

Casimir Périer (1894-1895)
Il est l'élu d'une coalition anti-dreyfusarde des droites monarchiste et républicaine. Jaurès dit de lui : «Il appartient à un milieu social où est en honneur la tradition larmoyante et hautaine du despotisme bourgeois ». Très hostile au développement du mouvement ouvrier (il était propriétaire des mines de charbon d'Anzin), il démissionne. Son ambition était contrecarrée par le parlement qui, selon lui, permettait la « liberté de souffler les haines sociales ».

Félix Faure (1895-1899)
Représentant des armateurs havrais, il est soucieux de faste (on le surnomme le « président soleil »), sans doute parce qu'il était d'origine modeste. Sa renommée lui vient de sa mort brutale à l'Elysée dans les bras d'une de ses maîtresses.

Paul Deschanel (quelques mois en 1920)
A l'origine un « député mondain », il est l’élu de la chambre « bleu horizon », la plus réactionnaire de l'entre-deux guerres. Mais dépressif à la suite de la mort de ses deux fils à la guerre, il est contraint à la démission et interné après être «tombé» d'un train et retrouvé marchant le long de la voie ferrée en chemise de nuit.

Albert Lebrun (1932-1940 – réélu en 1939)
Très effacé, il fait preuve d'une insuffisance totale au moment de la crise militaire et politique de mai/juin 40. En juillet il se soumet au coup d'état de Pétain, lui déclarant : «J'ai été toute ma vie un soutient fidèle de la loi, même quand elle n'avait pas mon adhésion morale ».

René Coty (1953-1959)
Le second et dernier président de la IVème République
Effacé lui aussi. C'était sans doute son intérêt puisqu’il avait voté, en 1940, les pleins pouvoirs à Pétain. En 1958, en pleine crise du putsch d'Alger, il menace de démissionner si les députés n'accordent pas les pleins pouvoirs «au plus illustre des Français», de Gaulle.

L’affairiste

Georges Pompidou (1969-1974)
Le deuxième président élu au suffrage universel de la Vème République. Agrégé de lettres, mais d'abord, professionnellement, le fondé de pouvoir en France de la Banque Rothschild. En 1973, il prend le contre-pied de de Gaulle qui avait affirmé que « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille». Désormais, l'Etat, pour se financer, ne s’adresse plus à la Banque de France, mais aux marchés internationaux. On connaît la suite...

Jean-Paul Brachet

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