mardi 26 février 2013

Extraits d'une réponse à l'article le "Vrai" de Jean Paul Brachet



Le « vrai » non vérifiable expérimentalement conduit-il nécessairement à l'intégrisme.



« Progressivement , l'homme s'est émancipé de l'affirmation sans vérification. La vérification étant l'aune du vrai, la mesure de toute chose. » C'est ce qu'affirme Jean-Paul Brachet. Voyons un peu.

Un personnage de Molière, Don Juan me semble-t-il, qui s'affirme comme incroyant, déclare: « Je crois que deux et deux font quatre ». Cela se vérifie  à condition de préciser « dans le système à base 10. »Il faudrait d'ailleurs dire dans ce cas-là: je SAIS que deux et deux font quatre. C'est « vrai » mathématiquement parlant.

Affirmation scientifique :  La terre tourne autour du soleil en une année de 365 jours, c'est « vrai! Je le SAIS » avec la nuance que ce n'est qu'une approximation, puisqu'il convient de rajouter tous les quatre ans un jour de plus dans le compte.Il est donc nécessaire de préciser dans quelles conditions on affirme qu'une chose est « vraie ». Par ailleurs, d'une manière générale, l'affirmation de ce qui est « vrai » dans le domaine scientifique, parce que « vérifiable », s'accompagne toujours ou devrait  s'accompagner, de la mention: « en l'état actuel de nos connaissances », ce qui laisse la porte ouverte au doute scientifique.

Mais il existe aussi
des choses qui peuvent être « vraies » sans être vérifiables . Il en existe dans le domaine mathématique,paraît-il, des vérités « indémontrables ». Il en existe aussi dans d'autres domaines. Si une personne en aime une autre, c'est « vrai » du point de vue de la personne qui l'affirme( si elle est sincère), les autres peuvent le croire ou non! De même, la personne qui en aime une autre, croit en l'amour de cet autre, qu'il soit effectif ou non! Peut-on  « vérifier » la réalité de cet amour? Évidemment non! D'ailleurs le fait que cela  vienne à l'esprit de l'un ou de l'autre de se poser la question ferait planer un doute sur la réalité de cet amour! Plus généralement, que serait une société ou la vérification serait en toutes choses, l'aune du « vrai »? Elle l'est déjà bien assez, car seul ce qui est matériel est vérifiable, et la société a tendance à réduire tout à l'aspect matériel. Appliquer  le critère « vérifiable » aux  comportements  est discutable. Peut-on affirmer comme « vrai »: «  Le moral des ménages est au plus bas, les Français n'achètent plus! » Réduire ses achats ou décider d'acheter d'occasion, (ce qui n'apparaît pas comme achat, car cela ne fait pas tourner l'industrie),signifie-t-il qu'on a le moral au plus bas? Ce peut être même parfois le contraire! La vérification ne me semble donc pas la mesure de toutes choses.Certes la théorie marxiste dira que l'amour n'existe pas mais qu'existe un certain état de la société, certaines conditions matérielles  qui font que s'exprimera ce qu'on appelle couramment « amour ». De même, les partisans de l'homme neuronal diront que cet amour n'est que le résultat de la chimie de notre cerveau. C'est une façon d'affirmer certains déterminismes que l'on ne peut pas nier, on peut « croire » néanmoins que l'être humain garde une certaine liberté que l'on nommera comme l'on voudra. C'est une croyance (j'ai employé le verbe croire!), mais à l'inverse, croire que l'être humain n'a aucun libre arbitre et est entièrement déterminé, c'est aussi une croyance. On ne peut le vérifier, pas plus que l'inverse...

Enfin,venons en au domaine des religions, derrière lesquelles vous voyez automatiquement se profiler le spectre du fanatisme, même si vous évoquez à juste titre également les fascismes qui sont aussi des systèmes « religieux » au sens au vous concevez les religions. Il est regrettable en effet que des croyants veuillent faire interdire ce qu'ils appellent « blasphème ». S'ils réfléchissaient avec un peu de recul, ils pourraient se dire (et nombre de croyants d'ailleurs, contrairement à ce que vous pouvez penser, se le disent)que celui ou ce qu'ils nomment « Dieu », s'il en est un, est  autre et au-delà de tout ce qui existe,et  ne peut  donc être atteint par aucune « attaque » humaine, puisqu'il n'existe pas au sens ou une chose existe. Vous ricanerez peut-être en « croyant » que les croyants  se perdent dans des arrière-mondes, il n'en est rien. Simplement, il faut être assez ouvert pour admettre que Dieu « existe »pour celui qui croit en lui, de même qu'il n'est pas nécessaire qu'un amour humain  « existe »  effectivement pour qu'il existe pour la personne qui aime. Ce qui est regrettable, c'est que les médias, et un journal  comme l'Anjou Laïque en particulier, ne voient dans les religions qu'organisations impliquant un principe d'obéissance à des dogmes. Il en fut malheureusement ainsi pendant longtemps et cela vous semble l'être aujourd'hui encore, alors que les dogmes sont considérés dans les versions libérales des religions, comme relevant de la culture de l'époque où ils ont été établis, et devant être  interprétés. Certains pensent en particulier à l'Islam, mais là encore, on attribue à la religion ce qui relève de comportements tribalistes qui se sont greffés sur une religion. Lisez à ce sujet, si la question vous intéresse, le livre de la journaliste canadienne d'origine ougandaise, Injar Manji, lesbienne et musulmane qui n'a pas froid aux yeux: « Allah, liberté, amour ».

Cela dit, si les paroles prêtées au Christ dans l'évangile de Jean « Je suis le chemin, la vérité et la vie » ont pu être interprétées comme dogmatiques, par ceux qui ne conçoivent que la vérité scientifique, la question de Pilate « Qu'est-ce que la vérité? », question à laquelle il n'est pas répondu, ouvre des pistes de réflexion. Là où vous voyez obligation, obéissance, etc  moi je vois au contraire ce qui permet d'avoir un regard critique sur sa propre vie et sur le monde. Le chemin, la vérité et la vie sont en chacun, si l'on veut en prendre le risque !


 Roseline CAYLA (abonnée de longue date)

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